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¤*Flocon de Soleil*¤
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27 décembre 2007

*We are stars*

Il pleut. Comme un oiseau, nous survolons la ville endormie. Seules quelques fenêtres semblent abriter une lueur d'éveil. Une aube grise est sur le point de se lever, et les couleurs qui animent les formes immobiles de la nuit apparaissent peu à peu. L'agglomération n'est pas très étendue. A l'est, une rivière sépare le centre ville d'un quartier de bicoques miséreuses. C'est dans cette direction que nous allons.
Là-bas, une petite place boueuse, dans laquelle se dresse un chapiteau aux couleurs délavées. On devine du rouge et du blanc, ou une couleur approchante qui l’avait été un jour. A côté du chapiteau, six roulottes serrées les unes contres les autres. Deux d'entre elles hébergent des animaux. Un vieux lion, un tigre pas très jeune non plus, deux singes. Deux chevaux sont attachés à la roulotte suivante. Les pattes couvertes de boue, ils dorment debout, l'encolure alourdie pour les trombes d'eau absorbée par leurs longues crinières.
Christian ...
À l'intérieur de la roulotte, tout semble endormi, mais... Non, une bougie est allumée, et posé sur le rebord de la fenêtre. Nous nous glissons dedans par la porte peinte en rouge. Au bout de la roulotte, une femme est assise au chevet d'une jeune fille aux cheveux cuivrés. Nous nous approchons. Un journal posé sur la petite table nous apprend que nous sommes le 16 octobre 1921, ou dans un de ses quelconques lendemains.
Te souviens-tu, Christian ? ...
Notre regard se relève et observe un instant la femme assise. Vêtue de parures joyeuses et colorées qui jurent horriblement avec son air effaré, elle tient la main de la jeune fille. Ses yeux sont rouges mais aucune larme ne coule sur son visage cireux.
Nos yeux se posent sur l'endormie. Sa peau claire et ses traits fins lui donnent un air fragile. On imagine facilement ce visage sourire tendrement. Mais on comprend que quelque chose de grave s'est produit.
Les applaudissements émus, émerveillés. On avait réussi, Christian, on avait réussi ! La salle était debout. Tu étais si beau...
Le bras fin de la jeune fille, posé sur les couvertures, est à demi découvert. Sa chemise de nuit en coton blanc est retroussée jusqu'à son coude. A la lueur vacillante de la bougie qui rétrécit à vue d'œil, on aperçoit des hématomes. Des taches violacées sur une peau si blanche ! Sa main ; serrée dans celle de la femme, sans doute sa mère, oui, appelons-la sa mère ; est écorchée. On regarde de nouveau son visage. Ses cheveux auburn sont éparpillés sur l'oreiller comme des veines sous une peau trop fine. Rien ne semble refléter la violence qui laissa des marques sur son bras.
Tu étais à gauche de la tente, et moi à droite. Les projecteurs nous rappelaient où nous étions, comme des phares au milieu d'une tempête de bravos. Leur chaleur, leur lumière aveuglante nous signifiait que nous étions à une dizaine de mètre de hauteur, et qu'aucun filet n'était tiré en dessous. Et ton sourire, Christian...
Comment savoir ce qui était arrivé à cette fille, et qui avait tant fait pleurer sa mère ? On se retourne pour observer la roulotte, à la recherche d'indices. Qui est-elle, cette princesse endormie ? Sur la commode derrière la femme, un bouquet de roses rouges se fane dans son vase. Une carte est posée à côté. « Ce soir, nous serons les plus belles étoiles du cirque, mon amour », y lit-on. Nous supposons que c'est son fiancé qui lui a envoyé ces fleurs, en signe d'encouragement pour la représentation à venir ce soir-là. A la vue des roses, on sait que cette soirée s'est déroulée il y a plusieurs jours déjà.
Des étoiles, oui, voilà ce que nous étions ! On entendait, en bas, la voix de M Zimler tenter de couvrir les applaudissements. Il me semble avoir compris quelque chose comme : « Ainsi se termine notre spectacle ! Encore un grand bravo à Christian et Lily, nos... ». Je n'écoutais plus. J'étais aux anges. Nous avions réussi, Christian ! Nous avions réussi cette figure à des mètres du sol, cette figure que l'on travaillait sans relâche depuis des mois ! Tes yeux étaient plongés dans les miens, tu semblais si heureux, une joie à la hauteur de nos efforts.
Lily. C'est le nom écrit au dos de la carte. « Pour Lily »... Lily. Lily. Ce nom est doux à prononcer, il roule sur la langue comme un bonbon à la fraise. Au mur, une photo en noir et blanc la montre aux bras d'un jeune homme séduisant. Ils ont l'air heureux, et amoureux. La photo suivante représente encore Lily, seule cette fois, visiblement en train de s'entraîner. On devine une goutte de sueur sur son front, témoin du labeur de la jeune acrobate. Elle sourit néanmoins.
Il fallait bien en finir, pourtant. Notre gloire est brève, et c'est ce qui la rend si intense. Sous ton regard comblé, j'avais commencé à me balancer doucement, pour te rejoindre sur ton trapèze, et qu'on nous descende ensemble, comme nous l'avions toujours fait. Je glissais en arrière, me tenant à la barre du creux des genoux, les bras tendus pour que tu me rattrapes. D'un élan parfait, je lâchais le trapèze. Moment toujours magique, ces secondes où je vole, à quelques centimètres de tes mains qui me rattrapent toujours avant que je ne tombe... Cette fois-là comme les autres, je terminais notre figure sur tes genoux, toi me tenant par la taille. Ton souffle chaud dans ma nuque, et... Oh, Christian...
Nous curiosité se fait plus pressante. Pourquoi ce jeune homme n'est-il à pas à tes côtés, Lily ? Pourquoi es-tu alitée, le visage pâle comme le mort, ta mère veillant sur toi aux dernières heures de la nuit ? La bougie est sur le point de s'éteindre. Sa lumière se fait de plus en plus tremblante, de plus en plus rouge aussi. Nos yeux retombent sur le journal. Cette fois, nous lisons plus que la date. Et, en bas de page de une, un titre attire notre regard.
« Accident tragique au cirque Zimler
A la fin de la représentation de samedi s'est produit un tragique accident sous le chapiteau du cirque Zimler. Le spectacle se terminait par un numéro de trapèze, brillamment exécuté par deux acrobates. Malheureusement, alors que les jeunes gens se faisaient redescendre à terre sur le même trapèze, une corde s'est rompue, visiblement à l'usure, causant la mort du jeune homme et blessant gravement sa compagne. Christian Zimler avait alors 23 ans.»
Lily, tu parais dormir si paisiblement. Peut-être que ton inconscient ne veut pas que tu t’éveilles. Que tu vives la douleur et l'absence. Peut-être que dans tes rêves, Christian et toi exécutez la plus belle des figures, dans le vide. Au milieu des étoiles.
La bougie s'éteint. La femme ne bouge pas d'un cil. Nous aussi décidons de veiller un peu sur toi. Dehors, il pleut toujours.
Christian...

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Commentaires
J
bonne nouvelle
P
Bonjour, <br /> je te souhaite de bonnes et agréables fêtes de fin d'année avec ceux que tu aimes et qui t'aiment. J'espère que 2008 sera pour toi une année riche en émotion, que tu connaitras la santé mais aussi la réussite, enfin que ton blog continura à nous réjouir que tu auras la visite fidèle de nombreux lecteurs.
Ó
Ma! Te zo ur skrivagnerez a-feson, anat eo!<br /> Ya, abeg zo da lar "bravo"!
K
:-)
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